Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Deuil des Chauves-Souris
Le Deuil des Chauves-Souris
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Newsletter
0 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 157 410
16 septembre 2010

Le Deuil des Chauves-Souris

De la dévolution successorale

Le législateur Kongo dans les juridictions coutumières réglemente
la question de la dévolution successorale selon des prosopopées précises :

" Pour hériter du chien, il faut au moins être né de l'espèce des
canidés comme le chat" (Fua dia mbua biadila mbuma).
"Pour hériter de la fouine, il faut être né de l'espèce des mustélidés
comme la belette" (Fua dia mfuenge biadila m'baku).

En toute logique matrilinéaire, l'héritage d'un individu passe à un membre
de son clan. Ainsi un neveu hérite de son oncle, c'est-à-dire du frère de
sa mère. Cependant, un enfant n'hérite pas de son père géniteur. Une veuve
n'hérite pas deson défunt mari. Le droit civil congolais tiré du droit
napoléonien s'oppose de façon radicale aux droits coutumiers de différentes
ethnies congolaises. Cette cohabitation juridique pose un casse-tête aux
magistrats congolais confrontés à trancher les questions d'héritage soumises
par les justiciables des deux Congo, d'Angola et du Cabinda. Pour justifier
la cohérence de sa démarche parémiologique, le législateur Kongo,
a posé une controverse aux lois évoquées dans les deux premières
métaphores :

" Fua dia ngembo, biadila lumfikini ? !  "

Cette proposition est interrogative et exclamative à la fois.
Elle n'est pas déclarative ni affirmative. En français, elle se traduirait de la
sorte : "Ce serait scandaleux que l'héritage d'un vrai chiroptère comme la
roussette passât à la chauve-souris."

Les deux personnages, la chauve-souris et la roussette appartiennent à
la même espèce des chiroptères. Pourquoi le législateur Kongo a-t-il
introduit une discrimination parmi les chiroptères ? Pourquoi ?
Un vaudeville kongo nous en suggère l'intuition :

N'tu ngembo                  La tête de la roussette
Bu ba bindamana go,          Allume tant de convoitises
N'tu ngembo,                 La tête de la roussette
Lugu lua yoka.               À Cause de sa saveur.

D'après l'imagerie populaire kongo, faisant jurisprudence, ayant inspiré le législateur, la
roussette et la chauve-souris ne sont pas de même condition, ni de
même classe :

" Elles n'appartiennent pas à la même classe, même si elles sont de même origine
clanique " (Ka bena nkunku imosi ko, ni ba tuka kuma kumosi).

La roussette ngembo est une grande chauve-souris, tandis que lumpukunia
ou lumfikini est une petite chauve-souris. Le législateur aurait découvert
dans ses investigations l'existence des classes, concomitantes aux clans
dans la société kongo. La classe serait perçue comme le tragique existentiel
au sens kierkegaardien ou la cohorte plaideront les démographes, dont une
proposition traduit la présence : "Dans un champ de maïs,
nous portons tous la barbe " (Kimfumu ku nsitu masangu, beto kulu, ye
nzefo, ye nzefo
). Sous une formulation usitée, les Kongo clament :

" Nkunku imosi tuena, nous appartenons à la même génération ".

La contre-proposition laissée au pouvoir discrétionnaire des
magistrats coutumiers, Banzonzi, pour éviter un vide juridique est
la suivante :

"La famille n'est pas un champ de maïs où tout le monde porte la barbe "
(Kanda ka kimfumu ku nsitu masangu ko, na bakulu, nzefo yi nzefo).

Ainsi s'éclaire l'histoire de la pauvreté des chiroptères. Alors que
"le malheur du hérisson fut occasionné par le chien "
(Bunsana bua nsibizi, mbua wa sa bo) ;

La pauvreté de la chauve-souris n'est ni congénitale, ni intra clanique.
Que non ! A l'assemblée des sorciers, lisanga ya bandoki,
le plus fêlé d'entre eux, le lion, dictateur de la savane fut représenté
par sa femelle.
La lionne prononça des sentences relatives au devenir de l'humanité :

"La chauve-souris est un commis sur terre de la roussette"
(Lumpfikini, Ngembo kua ka yizi tudisa ga ntoto-nsi).

"L'héritage échu à la chauve-souris sera réversible sur la tête
de mon cousin, le léopard" (Fua dia Lumpfikini ya ngo biadila dio);

"Nous confisquerons l'autorité des coqs sous couleur de défense des poussins"
(Nsusu batele nsusu ia mbakala, ni yi ba na menga, ka yilenda
ya vutu kuba ga gata ko ; Luyalu kua lenda kudisa bana ba nsusu
) ;

"Nous placerons le sexe de la poule sous la patte des pintades"
(Nsusu ia nkento mu sompana, fuete lomba luve kue ma Nkelele).

"Et moi la pintade, reine-mère, on m'acquiert emballée.
(Mono nkelele, mfumu nkento, mu nkutu bansumbila.

Un homme ne peut voir mon corps s'il ne m'a pas épousée"
Bakala ka lenda ka mona nitu'ami ko vo ka nkuelele ko).

Un assistant interloqué fredonna un air oublié :

Ntu na makoko, n'tu na makoko
Nzambi wa sa bo
Nzambi wa sa bo

Ka diambua ko
Ka diambua ko

Nkia kia ku tebalala
Nkia kia ku tebelala

"La vache et le taureau sèmeront la débauche dans vos lieux de travail"
(Ma Ngombe na Ta Mpakasa, buyala ba mwangasa ga mbuka za lusadila);

"Au point où les travailleurs élèveront au rang de supérieurs hiérarchiques
les plus voyous d'entre vous"
(Bisadi, mfumu za sakabumpumbulu ba tumba).

Face aux besogneux :
"Kimpati-mpa aide-moi"
(Kimpati-mpa mpana mlele
) ;

Voici la réplique à infliger :
"Aide-toi, le ciel t'aidera"
(Mono bene nkuni na luata).

Mécontente, la libellule bouda l'assemblée puis s'envola :
"Je suis une libellule, et on verra"
(Mono lumpungu-nzala ndiena, he wa ya ya),

"Le serpent Kimbanzia dansera à la sueur de l'escargot"
(Tala kua Kimbanzia ki tina na Nkodia).

 M'BOKA Kiese

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité